S’il est bien un genre cinématographique que j’aime, c’est le western. Pour autant, faire de nos jours un western réussi relève de la gagure tant le sujet a été vu et revu dans tous les sens.
Dans Appaloosa, Ed Harris repasse derrière la caméra et signe ici son deuxième film en tant que réalisateur, après « Pollock » en 2003. Ce coup-ci, c’est un roman, Appaloosa de Robert B. Parker, qui passe dans les mains de l’acteur.
Appaloosa est une ville du Nouveau-Mexique où la loi du Colt est souvent la plus forte. Un puissant propriétaire terrien, Randall Bragg (Jeremy Irons), n’hésite pas à dessouder le sheriff et ses adjoints qui venaient pour arrêter deux de ses hommes. Devant une ville sans loi ni ordre, les notables font alors appel à Virgil Cole (Ed Harris) et Everett Hitch (Viggo Mortensen), deux fines gâchettes dont le travail est de rétablir l’ordre dans les villes. Leurs méthodes expéditives ainsi que leur amitié indestructible mettent la ville au pas. Pour autant, Bragg est loin du bandit de grand chemin et il mettra des batons dans les roues du duo, surtout que l’arrivée d’une jeune veuve en ville, Allison French (Renée Zellweger), vient compliquer la tâche de Virgil Cole…
Appaloosa est un western, un vrai, pur jus. Tous les codes y sont : les grands espaces, les bagarres au saloon, les bandits, les justiciers, les traitres, les indiens et la jolie demoiselle. De ce coté, on est en territoire connu, pas de (mauvaise) surprise à vouloir moderniser le tout. En revanche, là où le film se différencie, c’est dans son réalisme revendiqué et parfaitement assumé : Les combats sont rapides et brouillons, les justiciers sont des super gâchettes sans culture qui ne savent pas parler aux femmes ou qui essaient de faire de belles phrases comme dans les livres sans pour autant en comprendre le sens (Viggo Mortensen lâchera après une tirade alambiquée « Vous n’avez pas compris ? Moi non plus d’ailleurs, bonne journée » )
Bref, Ed Harris écorne gentiment le mythe de l’Ouest où les cowboy étaient des flingueurs joli coeur, qui faisaient régner l’ordre tout en faisant chavirer le cœur des dames. Cela donne des dialogues souvent savoureux, parfois drôles mais qui sonnent juste et bien plus crédible à une époque où savoir manier une arme était plus important que de savoir lire.
Dans le rang des réussites du film, on notera l’étonnant duo Ed Harris / Viggo Mortensen. Compagnon d’arme depuis 12 ans, leur amitié, leur confiance et respect mutuel transpirent à l’écran d’une fort belle manière. L’autre grand atout du film revient au traitement de la femme. Le rôle de Renée Zellweger illustre bien une époque ultra violente où les femmes n’avaient pas leur mot à dire. Du coup, elle s’émancipe assez vite du simple rôle de la garce de service pour celui de la femme apeurée par ce monde machiste et violent.
Appaloosa n’est pas pour autant un chef d’oeuvre incontesté. Des lenteurs scénaristiques viennent plomber le tableau et les vingts dernières minutes du film sont « de trop ». Ed Harris livre une réalisation soignée et sobre mais il a pêché par gourmandise sur le scénario et on a un peu l’impression qu’il a voulu trop en faire. Dommage, car le spectateur décroche par moment. De même, le traitement de l’histoire laisse assez peu de place à l’action « traditionnelle » donc si vous voulez un western violent où ça canarde, vous pouvez passer votre chemin.
Mais si ces points ne vous rebutent pas, alors foncez voir Apaloosa. Son histoire originale, ses personnages attachants et son incroyable casting valent le détour, pour peu que vous aimiez le western !